Trump peut-il réussir ?
par Thierry Meyssan
Réseau Voltaire
mer., 16 nov. 2016 16:54 UTC
Donald
Trump et le général Michael T. Flynn
Pendant
que la presse atlantiste persiste à projeter sur Donald Trump les débats
artificiels qu’Hillary Clinton a imposés durant la campagne et que se
multiplient les appels à assassiner le président élu, celui-ci se prépare à
changer de paradigme, à renverser l’idéologie puritaine qui domine son pays
depuis deux siècles. Mais peut-il réussir ?
Réseau Voltaire | Damas (Syrie)
La presse internationale tente de nous persuader que les électeurs de
Donald Trump ont exprimé une révolte des Petits Blancs face aux élites. Elle ne
fait en réalité que prolonger le discours d’Hillary Clinton que, précisément,
ces électeurs ont rejeté. Elle refuse d’envisager que le clivage actuel n’ait
aucun rapport avec les thèmes qu’elle a traités durant cette campagne.
Pourtant,
nous avons tous vu une nouvelle ligne de fracture apparaître non pas entre les
deux grands partis, mais en leur sein. De nombreux leaders républicains ont
soutenu Clinton et quelques leaders démocrates Trump. Bernie Sanders vient même
de lui proposer ses services. De même, l’analyse des votes en fonction des
appartenances communautaires (femmes, hispaniques, noirs, musulmans, gays,
etc.) n’a pas plus de sens. Bien que l’on nous ait rabâché que voter Trump,
c’était voter pour la haine des minorités, au moins un tiers des minoritaires a
voté pour lui.
Quelques
journalistes tentent de s’appuyer sur le précédent du Brexit, alors même qu’ils
avaient été identiquement surpris par celui-ci et incapables de l’expliquer. Si
l’on analyse en fonction des précédents étrangers, on doit au moins tenir
compte des élections surprises de Narendra Modi en Inde et de Rodriguo Dutertre
aux Philippines (une ancienne colonie états-unienne).
Malgré la
propagande, les Britanniques n’ont pas voté contre les Européens, les Indiens
contre les musulmans, et les Philippins contre les Chinois. Au contraire,
chacun de ces trois peuples cherche à sauver sa propre culture et à vivre en
paix. Bien que responsable des émeutes anti-musulmanes du Gujarat, en 2002,
Narendra Modi a tendu la main au Pakistan, persuadé que les problèmes entre les
deux pays ont été organisés et entretenus par les puissances coloniales. De
même, Rodriguo Dutertre a-t-il provoqué la stupeur en se rapprochant de
l’« ennemi » chinois.
J’expliquais,
il y a quelques semaines, dans ces colonnes[1] que
le clivage qui divise les États-Unis n’est déterminé ni par les appartenances
ethniques, ni par les classes sociales, mais par l’idéologie puritaine. Si
cette explication est juste, nous devrions assister à une lutte existentielle
des partisans de cette idéologie face à l’administration Trump. Tout ce
qu’entreprendra le nouveau président sera systématiquement saboté. D’ores et
déjà, les manifestations sporadiques contre le résultat de l’élection attestent
que les perdants ne respecteront pas les règles de la démocratie.
Plutôt que
de réfléchir à la manière dont nous pourrions tirer avantage de
l’administration Trump, nous devrions nous demander comment nous pouvons
l’aider à réussir à libérer son pays de son propre impérialisme, à mettre fin
au monde unipolaire et à la « doctrine Wolfowitz » ; comment
nous pouvons substituer la coopération à l’affrontement.
Alors que la
presse états-unienne spécule sur les nominations possibles de personnalités de
l’administration Bush au sein de l’administration Trump, nous devons anticiper
le rôle politique que joueront les cadres commerciaux de la Trump Organisation,
les seuls en qui il puisse avoir confiance.
Nous devons
nous appuyer sur le général Michael T. Flynn qui, quoique démocrate, fut le
principal conseiller en politique étrangère et de défense durant sa campagne.
Commandant du Renseignement militaire, de la Conférence de Genève 1 à la
conquête de l’Irak par Daesh, il n’a cessé de combattre le président Obama, la
secrétaire d’Etat Clinton, les généraux David Petraeus et John Allen, et
Jeffrey Feltman à propos de l’usage des jihadistes et du terrorisme pour
maintenir l’impérialisme états-unien. Qu’il soit conseiller de Sécurité
nationale, directeur de la CIA ou secrétaire à la Défense, il sera le meilleur
allié de la paix au Levant.
Source
Al-Watan (Syrie)
Al-Watan (Syrie)
[1] [1] « Les
États-Unis vont-ils se réformer ou se déchirer ? », par Thierry
Meyssan, Al-Watan (Syrie), Réseau Voltaire, 25 octobre 2016.